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Le dépouillement et la proclamation des résultats – Mauritanie

Après les résultats « du Dialogue National » en 2012, il a été décidé de créer une Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) permanente chargée d’organiser les élections, mettant ainsi fin au système d’organisation par le Ministère chargé de l’Intérieur. Le système de dépouillement du scrutin et de proclamation des résultats sous la nouvelle CENI tel que prévu par les textes est différent de celui qui était organisé par le Ministère de l’Intérieur. Avant de voir ce nouveau système de dépouillement et de proclamation des résultats, il convient de montrer comment il était organisé en insistant sur cinq aspects : le dépouillement, la centralisation des résultats, la requalification des bulletins, la proclamation des résultats et la publication des résultats bureau de vote par bureau de vote.

L’ancien système de dépouillement du scrutin et de proclamation des résultats définitifs

Dépouillement : Le dépouillement du scrutin est fait du début à la fin par le Ministère de l’Intérieur sous la supervision de la CENI (ancienne CENI non permanente). Ce dépouillement s’est révélé particulièrement problématique lors du premier tour des élections municipales et législatives passées, en particulier en raison de la combinaison des deux scrutins simultanés. Le taux anormalement élevé de bulletins déclarés nuls à l’issue de ce premier scrutin a constitué une faiblesse importante du processus électoral : 10,1% pour les élections municipales, 15,6% pour le scrutin législatif par circonscriptions et 23,6% pour la liste nationale. Les observateurs ont pu constater lors du décompte des voix que l’interprétation de la validité du marquage des bulletins était généralement trop restrictive. Le ministère de l’Intérieur a par conséquent pris une instruction appelant le personnel électoral à montrer plus de flexibilité en la matière lors du deuxième tour. Le taux des bulletins nuls a chuté fortement au second tour (6,2%).

Aussi, sur base des enseignements tirés des scrutins municipaux et législatifs, le ministère de l’Intérieur a sensiblement amélioré la conception du procès-verbal des opérations de vote pour l’élection présidentielle de 2007 et 2009. A l’issue du dépouillement, un extrait du procès-verbal de résultats a été affiché à l’extérieur des bureaux de vote et remis à chacun des représentants des candidats dans la plupart des cas.

Centralisation des résultats : La centralisation des résultats des élections législatives et municipales, était réalisée en deux étapes : au niveau de chaque moughataa par la commission de recensement départementale (présidée par un magistrat et comprenant deux fonctionnaires désignés par arrêté conjoint des Ministres de l’intérieur et de la Justice), puis au niveau de la wilaya, par la commission de recensement régionale (Présidée par le Wali, et comprenant deux magistrats et de deux fonctionnaires régionaux). Une copie du procès-verbal de centralisation des résultats régionaux était ensuite transmise à la Cour Suprême pour les scrutins municipaux, au Conseil constitutionnel pour les scrutins législatifs, ainsi qu’au Ministère de l’intérieur et à la CENI. La centralisation des résultats des élections municipales et législatives a été réalisée dans des conditions de transparence acceptables.

Le processus de centralisation des résultats des élections présidentielles 2007 et 2009 s’est déroulé de façon similaire, mais au niveau des 53 moughataas seulement, les wilayas n’étant pas impliquées dans le dispositif. Les 53 Commissions de recensement des votes (présidées par un magistrat en lien direct avec le Conseil constitutionnel) constituaient une structure théoriquement indépendante des autorités administratives. En raison de l’imprécision des textes, on a néanmoins relevé une grande variété dans les modalités de fonctionnement de ces commissions. Avec une implication plus ou moins forte des autorités administratives, certaines commissions étaient même reléguées à un rôle relativement passif. Dans l’ensemble, la centralisation des résultats a cependant été conduite de manière efficace et transparente.

Requalification des bulletins : Des demandes de requalification et de recompte des bulletins de vote ont été faites lors des élections législatives, notamment à Kiffa et à Aleg. Le traitement de ces demandes a donné lieu à de longues hésitations de la part des autorités administratives concernées quant à la décision à prendre et quant aux modalités pratiques d’une telle opération.

Proclamation des résultats : Les textes applicables aux différentes élections stipulent que le Ministère de l’intérieur est chargé d’en proclamer les résultats provisoires, sans pourtant en fixer les délais (Dans le cadre de l’élection présidentielle, il est simplement précisé que « pour chaque moughataa, le recensement des votes doit être achevé au plus tard le lundi qui suit le scrutin à minuit » (art. 28 du décret 91-140 modifié par le décret 2007-001). Dans le cadre des élections municipales et législatives, les résultats deviennent définitifs automatiquement après épuisement du contentieux – sous réserve des décisions rendues séparément par la Cour Suprême ou par le Conseil constitutionnel. Les résultats définitifs du scrutin présidentiel, en revanche, font l’objet d’une proclamation officielle par le Conseil constitutionnel.

Publication des résultats bureau de vote par bureau de vote : Lors de la journée de concertation du 31 octobre 2006, les autorités avaient accepté de s’engager auprès des partis politiques à publier sur Internet les résultats des élections de façon détaillée par bureau de vote, en vue notamment de leur permettre d’en effectuer la vérification et de motiver d’éventuels recours en contestation. Le Ministère de l’intérieur a par la suite publié les résultats des bureaux de vote pour quelques wilayas seulement. Lors du second tour de l’élection présidentielle, le Ministère de l’intérieur a ainsi entamé, dès le surlendemain du scrutin, la publication sur Internet de résultats par bureau de vote, mais celle-ci est demeurée très partielle et n’a pas été complétée par la suite. En accord avec le Ministère de l’intérieur, la CENI a néanmoins établi un dispositif très performant lui permettant d’assurer une diffusion rapide des résultats détaillés par bureau de vote.

Le nouveau système de dépouillement et de proclamation des résultats définitifs

Dans le nouveau system, c’est la CENI qui organise le dépouillement du scrutin. Le dépouillement se fait dans le bureau de vote composé d’un président et deux assesseurs désignés par délibération de la CENI sur proposition des antennes régionales et locales de la CENI. Dès que le président du bureau de vote déclare le scrutin clos, il est procédé du dépouillement des votes par les membres du bureau de vote. Le dépouillement doit être conduit sans désemparer jusqu’à son achèvement complet.

Les membres de bureau de vote déterminent le nombre de suffrages exprimés en déduisant du nombre total des bulletins trouvés dans l’urne, le nombre de bulletins nuls. Une fois les opérations de lecture et de pointage terminées, les membres de bureau de vote arrêtent le résultat du scrutin en additionnant les totaux des feuilles de dépouillement. Chaque candidat ou liste de candidats comptabilise le nombre de suffrages recueillis.

Le procès-verbal des opérations de vote doit être rédigé au bureau de vote immédiatement après la fin des opérations de dépouillement et doit mentionner : (i) Le nombre d’électeurs inscrits ; (ii) Le nombre de votants ; (iii) Le nombre de bulletins de vote nuls ; (iv) Le nombre de suffrages exprimés ; (v) Le nombre de votes neutres ; (vi) Le nombre de voix obtenues par chaque candidat ou liste candidate

Doivent être insérés dans le procès-verbal toutes les réclamations formulées par le représentant d’une liste candidate et toutes les décisions motivées pendant les opérations de vote. Le Président du bureau de vote invite obligatoirement les membres du bureau de vote à contresigner le procès-verbal. Au cas où le contreseing est refusé, mention est faite au procès-verbal en précisant éventuellement le motif. Les bulletins de vote que le bureau a déclaré nuls doivent être annexés au procès-verbal. Les bulletins annexés doivent être signés par tous les membres du bureau de vote. Le bureau de vote établit le procès-verbal de dépouillement des résultats qui sera, s’agissant des élections municipales, en quatre exemplaires ainsi répartis : (i) Un exemplaire destiné à la Cour Suprême ; (ii) Un exemplaire destiné à la CENI ; (iii) Un exemplaire destiné l’Autorité administrative territorialement compétente ; (iv) Un exemplaire destiné à la Direction Générale de Services d’Appui au Processus Electoral.

Ce procès-verbal sera en cinq exemplaires pour les élections présidentielles et parlementaires ainsi répartis : (i) Un exemplaire destiné au Conseil Constitutionnel ; (ii) Un exemplaire destiné à la CENI ; (iii) Un exemplaire destiné au Ministère de l’Intérieur ; (iv) Un exemplaire destiné à la Wilaya (région) ; (v) Un exemplaire destiné à la Moughataa (département). Des extraits du procès-verbal sont remis par le bureau de vote aux représentants des candidats ou listes candidates et un extrait du procès-verbal est affiché devant le bureau de vote.

Pour les mauritaniens établis à l’étranger, les résultats du vote sont consignés dans des procès-verbaux en cinq exemplaires ainsi répartis : (i) Un exemplaire destiné au Conseil Constitutionnel ; (ii) Un exemplaire destiné à la CENI ; (iii) Un exemplaire destiné au Ministère de l’Intérieur ; (iv) Un exemplaire au Ministère des Affaires Etrangères ; (v) Un exemplaire destiné à la représentation diplomatique ou consulaire concernée.

Les résultats du scrutin, dès leur réception par les chefs des représentations diplomatiques ou consulaires sont immédiatement communiqués par ceux-ci aux organismes destinataires des procès-verbaux cités ci-dessus. Les procès-verbaux des opérations électorales et leurs annexes établis par les bureaux de vote sont transmis par valise diplomatique.

Centralisation des résultats : La centralisation des résultats des élections municipales et parlementaires est effectuée par la structure territorialement compétente de la CENI. Les opérations de centralisations de l’élection sont constatées par un procès-verbal qui est communiqué à la Cour Suprême, à la CENI et au Ministère de l’Intérieur, s’agissant des municipales ; au Conseil Constitutionnel à la CENI et au Ministère de l’Intérieur s’agissant des élections parlementaires et présidentielles.

Proclamation des résultats : La proclamation des résultats des élections parlementaires et municipales sont proclamés par la CENI. Pour les élections présidentielles, les résultats définitifs sont proclamés par le Conseil Constitutionnel. La CENI proclame les résultats provisoires.

Contentieux électoral : Le système mauritanien prévoit deux types de recours possibles en matière de contentieux électoral : un recours administratif auprès de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et un recours judiciaire devant le Conseil constitutionnel et devant la Cour suprême. Le recours judiciaire s’exerce devant le Conseil constitutionnel dans le cadre des élections présidentielles, législatives et sénatoriales et devant la Cour suprême lorsqu’il s’agit d’une élection municipale.

Pour l’élection parlementaire, tout candidat ou liste candidate a le droit d’arguer de la nullité des opérations électorales de sa circonscription électorale, suivant les résultats dûment transmis par la CENI devant le Conseil Constitutionnel.

S’agissant de l’élection présidentielle, sans préjudice des prérogatives du Constitutionnel, juge de l’élection présidentielle, les décisions de la CENI, prises en ses différents niveaux hiérarchiques et à toutes les étapes de la procédure, peuvent faire l’objet de recours devant la CENI. La réclamation est adressée à la CENI soit dans le procès-verbal de dépouillement soit par saisine directe adressée à la CENI.

Tout candidat peut arguer la nullité des élections suivant les résultats dûment transmis par la CENI devant le Conseil Constitutionnel qui doit statuer dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine.

Pour les élections municipales, sans préjudice des prérogatives du juge compétent, les décisions de la CENI, prises en ses différents niveaux hiérarchiques et à toutes les étapes de la procédure, peuvent faire l’objet de recours devant la CENI. La réclamation est adressée à la CENI soit dans le procès-verbal de dépouillement soit par saisine directe adressée à la CENI.

Le mandataire de chaque liste peut arguer la nullité des élections, suivant les résultats dûment transmis par la CENI devant la Cour Suprême qui doit statuer dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine. Ce recours n’est pas suspensif.

Liens utiles et ressources documentaires

  • Ordonnance n° 92-004 du 18 février 1992 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel
  • Règlement n° 001-94 du 10 mars 1994 d’application de la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et sénateurs

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