Les conditions requises pour être électeur
Au Sénégal l’inscription et la participation aux joutes électorales sont soumises à des conditions bien définies par le Code électoral. Les citoyens sénégalais désireux de participer aux consultations électorales en qualité d’électeurs doivent au préalable s’inscrire sur les listes électorales. A cet effet, comme le stipule l’article LO.26 du Code électoral, pour s’inscrire sur les listes électorales le citoyen sénégalais doit être âgé de 18 ans révolus, jouir de ses droits civils et politiques et munir de sa pièce nationale d’identité numérisée qui est obtenue moyennant 1000 francs CFA. Les étrangers naturalisés vivant sur le territoire sénégalais peuvent également s’inscrire sur les listes électorales conformément à l’article LO.27 du Code électoral. En cas d’omission d’un citoyen sur les listes électorales ou juste une erreur sur son état civil, le citoyen sénégalais doit se rabattre sur le tribunal départemental à qui il revient la gestion de la phase contentieuse. L’article LO.47 stipule que «Le recours contre les décisions de la commission administrative est porté devant le Président du Tribunal Départemental. (…).» Ce mécanisme de régularisation du citoyen sénégalais sur les listes électorales s’est révélé être une limite dans les opérations d’inscription car, sociologiquement, le citoyen sénégalais a une perception singulière et méfiante par rapport au tribunal même s’il s’agit d’une opération purement électorale et non pénale.
Distribution des cartes d’électeurs
La Commission administrative est l’organe en charge de la distribution des cartes d’électeurs sur l’ensemble du territoire sénégalais durant la période ordinaire et la période exceptionnelle de révision des listes électorales. L’article LO.56 du Code électoral, dans son alinéa 1er dispose : « Il est créé dans chaque Commune d’arrondissement ou Communauté rurale, par arrêté du préfet ou du sous – préfet, des Commissions chargées de la distribution des cartes d’électeur ».
La distribution des cartes d’électeur s’opère en général annuellement pendant la période dite de révision ordinaire des listes électorales. Néanmoins, des situations exceptionnelles peuvent amener le Ministre en charge de l’organisation des élections à autoriser, par un arrêté, la distribution des cartes d’électeur. Cette période de révision exceptionnelle des listes électorales se tient non seulement en année électorale mais elle débute 40 jours avant le début de la campagne électorale et jusqu’à la veille du scrutin à 00h. La période de distribution des cartes d’électeur est bien déterminée par le Code électoral sénégalais en son article LO.42. Selon l’article LO.42 du Code électoral, « la distribution des cartes d’électeur a lieu pendant la période de révision ordinaire des listes électorales. Toutefois, pour des raisons exceptionnelles, les cartes d’électeur peuvent être distribuées en dehors de la période susmentionnée dans les conditions fixées par un arrêté du ministre Chargé des Elections». L’inscription sur les listes électorales ne peut se faire qu’une seule fois. Toutefois si un citoyen électeur sollicite plus d’une inscription sur une ou plusieurs listes électorales, seule la première demande d’inscription est prise en compte conformément au Code électoral en son article LO.46.
Identification des électeurs
Pour retirer sa carte d’électeur, le citoyen sénégalais doit nécessairement se présenter devant la Commission administrative et munir de sa pièce d’identité et du récépissé d’inscription. L’article LO.57 du Code électoral stipule, « les commissions visées à l’article précédent, procèdent à la remise individuelle des cartes à chaque électeur sur présentation de sa carte nationale d’identité numérisée et du récépissé d’inscription ». Cette disposition du Code électorale a pour finalité, entre autres, de lutter contre la fraude électorale. Avec la nécessité de s’inscrire sur les listes électorales et de retirer sa carte d’électeur personnellement, l’électeur est en contact direct avec la Commission administrative et, par conséquent, bien identifié. Dans l’éventualité d’une perte de la Carte nationale d’identité numérisée ou de la carte d’électeur, le citoyen électeur sénégalais doit faire une déclaration de perte à la police et demander un duplicata. Avant de s’acquitter de son devoir civique, l’électeur citoyen sénégalais doit obligatoirement munir de sa carte nationale d’identité numérisée et de sa carte d’électeur. Le votant doit présenter ses pièces d’identification aux membres du bureau de vote. Cette disposition est prévue par le Code électoral sénégalais en son article LO.78 qui stipule « A son entrée dans le bureau de vote, l’électeur doit présenter sa carte d’électeur. Il doit, en outre, faire constater en même temps son identité par la présentation de sa carte nationale d’identité numérisée ».
Controverses autour des listes électorales
Depuis la refonte du fichier électoral en 2005-2006, il est né au Sénégal des controverses sur la fiabilité du fichier électoral. Les acteurs politiques (pouvoir et opposition) et parfois des techniciens dans le domaine électoral ont entretenu des débats sur les listes électorales allant jusqu’au boycott des élections législatives du 3 juin 2007 par l’opposition dite significative regroupée au sein de « Benno Siggil Sénégal ». Et malgré la victoire de l’opposition dans de nombreuses collectivités locales le 22 mars 2009 à l’occasion des élections locales et surtout l’audit du fichier électoral, la controverse ne s’est pas estompée. Elle a refait surface durant le processus électoral de la présidentielle de 2012. Bakar Ndiaye, informaticien et expert en audit, a fortement soutenu à la veille de l’élection présidentielle de 2012 qu’” … il y a des failles sur le fichier électoral ” et que le président Abdoulaye Wade va être réélu avec un taux avoisinant 53%.
Dr Cheikh Tidiane Gadio, Président du Mouvement politique citoyen “Luy Jot Jotna” (MPCL) et candidat malheureux à l’élection présidentielle croyait fermement qu’« après le putsch constitutionnel, on s’achemine vers un putsch électoral » (il faisait allusion à la validation de la candidature du président Abdoulaye Wade par le Conseil constitutionnel). Pour eux, le système électoral et le scrutin ne sont qu’une tromperie malgré les assurances du gouvernement et des partisans de la majorité présidentielle, pour qui la présidentielle se déroulera dans la transparence et la régularité. C’est finalement sur la base de ce fichier électoral l’alternance démocratique de 2012 est intervenue.
A l’issue de l’élection présidentielle de février-mars 2012, le débat sur la suppression de la carte d’électeur est agité. Des missions d’observation électorale (MOE) internationale comme celle de l’Union Européenne et des missions d’observation électorale nationale à l’instar du Le Réseau Sénégalais des Observateurs Citoyens RESOCIT ont recommandé à l’Etat du Sénégal et aux acteurs de la classe politique de procéder à la suppression de la carte d’électeur. Ainsi, pour s’acquitter de son droit de vote le citoyen électeur pourra se contenter de sa carte d’identité nationale. La suppression de la carte d’électeur aura entre autre pour mérite de faciliter le vote et de permettre à l’Etat d’économiser beaucoup d’argent. Rappelons que l’Etat du Sénégal avait dépensé 40 milliards de Frs CFA pour la confection des cartes d’identité nationale et des cartes d’électeurs dont 20 milliards pour chacun des deux types de carte.
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